Innovation et péchés (mignons)

Le 6 juillet 2011 se tenait à l’hôtel Napoléon à Paris, une conférence intitulée « Innovation et péchés (mignons) ». Le pitch attractif de la conférence m’a convaincu de consacrer ma soirée à ce sujet qui m’est cher (l’innovation bien sûr !) :

« Luxure, jeux, alcools… ce sont des petits ou grand péchés, qui ont aussi inspiré des entreprises et des innovations. Du X, souvent pionnier sur le Net, aux sites de jeux en ligne en passant par la vente en ligne de chocolats, vins et de spiritueux, comment ces business pas comme les autres ont-ils utilisé la Toile et le numérique pour développer leurs activités ? »

Sujet éminemment délicat à traiter, je me demandais comment les intervenants allaient s’en sortir, et surtout si j’allais découvrir les ficèles utilisées par ces industries pas comme les autres pour innover sur le net. Cinq présentations se sont suivies, sans d’ailleurs de véritable fil conducteur :

  • Jeux sur Internet, par Maître Cathy Rosalie July, spécialiste des aspects juridiques des jeux en ligne
  • Vin en ligne, résumé de l’étude « Quels sont les meilleurs sites de vente de vin sur Internet en 2011 ? » réalisée par Bordeaux Ecole de Management (BEM)
  • Porno sur Internet par Damien Douani
  • Gleeden par Ravy Truchot, cofondateur de Gleeden.com et CEO de Blackdivine LLC
  • Marc Dorcel par Ghislain Faribeault, directeur des nouveaux médias de Marc Dorcel et Dorcel TV

Voici pêle-mêle les informations présentées qui ont attiré mon attention :

  • La procédure d’enrôlement des joueurs en ligne reste étonnamment lourde du fait des pièces à présenter pour garantir l’identité des joueurs, et bénéficierait avantageusement de la dématérialisation des preuves d’identité. Evidemment cela n’enlèverait en rien aux obligations règlementaires visant à protéger les joueurs contre leurs éventuelles addictions
  • A peine un an après l’ouverture du marché du jeu en ligne, l’ARJEL (Autorité de Régulation des Jeux en Ligne), déjà 19 mises en demeure ont été adressées aux éditeurs des sites. Ce qui a provoqué un débat en séance (surtout sur Twitter) sur les différences de positionnement entre l’ARJEL (qui sanctionne l’éditeur d’un site) et l’HADOPI (qui sanctionne le consommateur)
  • En 2010, 30 millions de français ont joué en ligne, générant un chiffre d’affaires de 26 milliards d’euros ! On comprend les convoitises qu’attire ce marché
  • Le premier site Web français de vente en ligne de vin, se classe au 6e rang mondial. Notre pays aurait-il du mal à tirer parti en ligne de son image de grand producteur de vin réputé dans le monde entier pour la qualité de nos vignobles ?
  • 12% des sites Internet sont considérés comme porno, sans compter les blogs,  soit 25 millions de sites Web. Le plus surprenant est d’essayer d’imaginer le nombre de personnes nécessaires au développement et à l’animation de ces sites : arrivent-ils tous à vivre de leur activité ?
  • Gleeden a adopté un positionnement volontairement sans tabous : les hommes et femmes mariés veulent avoir des aventures extra-conjugales, Gleeden leur offre un réseau social de rencontre, sans obliger ses membres à masquer la réalité de leur intentions. Positionnement qui ne manque pas de susciter débat, tant il bouscule les règles de notre société. Mais positionnement qui a déjà convaincu 850 000 membres dans 159 pays !
  • Marc Dorcel a misé sur l’innovation pour rester le premier sur son secteur, en proposant sur le marché des innovations technologiques, l’utilisation de technologies jamais utilisées auparavant sur son secteur, ou encore en tirant habilement parti des médias sociaux

L’ensemble des supports de présentation devraient être publiés en ligne (sauf l’étude sur le vin en ligne). Il faudra probablement surveiller les prochaines annonces de French Web pour les télécharger. Quant aux tweets relatifs à la conférence, ils sont tagués #innonapo.

Au final, cette conférence, bien que polémique (certaines marques auraient refusé de venir, on se demande pourquoi ?) offrait une occasion de débattre d’innovation dans des domaines peu habituels. Malheureusement l’innovation en elle-même n’était pas autant mise en avant que je l’aurais souhaité. Une prochaine conférence sera peut-être l’occasion d’entrer plus en détails dans les processus d’innovation de ces mêmes secteurs, de la génération des idées à leurs mises en ligne, en passant par les astuces juridiques dont il a fallu faire preuve pour dépasser les barrières de la loi et suivre l’évolution des mentalités. Et pourquoi pas de montrer comment certaines innovations initiées dans ces secteurs sulfureux, ont ensuite pu être reprises dans d’autres industries. Ou comment le vice génère de la valeur…

 

Et si les parents pouvaient enfin gérer les lignes téléphoniques de leurs enfants ?

Vos enfants sont de jeunes adolescents et vous leur avez offert leur premier téléphone mobile, afin qu’ils puissent vous appeler en cas d’urgence et aussi pour prolonger le contact avec eux. Les offres séduisantes des opérateurs télécoms permettent même de souscrire à des forfaits mobiles et fixes en même temps. Le rêve d’une offre « foyer » n’est pas loin. Mais il y a encore du chemin à faire !

Comme de nombreux parents, j’ai offert à ma fille un téléphone mobile. L’offre de Forfait bloquée proposée par SFR à l’époque nous avait séduite, faisant la part belle aux SMS, à la messagerie instantanée et à la musique pour un prix compétitif : le bon cocktail pour de jeunes adolescents. Tout allait bien jusqu’au jour où nous avons changé d’opérateur ADSL pour la maison. Et là encore, SFR avait su nous proposer une offre convaincante. Ce faisant, et comme nous avions indiqué pour la gestion du mobile de ma fille une adresse email de contact de notre précédent fournisseur ADSL (dont je tairais pudiquement le nom), il nous fallait mettre à jour cette adresse. Et pour cela nous connecter à l’espace client… de la ligne de ma fille ! Encore heureux qu’elle accepte encore de me laisser utiliser son téléphone pour récupérer le code d’accès à son espace client. Sinon, bien que la ligne soit au nom de mon épouse, il me serait impossible de la gérer en ligne. Et le comble, c’est que bien que la nouvelle adresse email de contact que nous avons indiquée soit chez SFR, l’espace client la considère invalide !

SFR Selfcare
Mise à jour de l'adresse email de contact d'un compte SFR Forfait bloqué

En désespoir de cause, et croyant encore aux merveilles de la technologie, je me suis tourné vers Lucie, la charmante assistante virtuelle qui se propose de répondre à toute question posée dans un français acceptable. Laquelle Lucie, pour me permettre de mettre à jour l’adresse email de contact de la ligne de ma fille, m’a aussitôt orientée vers… l’espace client bien sûr ! A ce moment-là, l’idée m’a traversé l’esprit d’engager une conversation avec Lucie, lui faisant remarquer qu’elle devrait quand même savoir que je venais justement de l’espace client ! Mais aussi que j’avais consciencieusement rempli le formulaire de mise à jour d’adresse email de contact. Lucie serait-elle ignorante de mon activité sur son site Web ? Voilà qui est troublant !

SFR Assistante virtuelle Lucie
L'assistante virtuelle Lucie renvoie vers l'espace client, d'où je viens !

Après de vaines tentatives, il ne restait plus qu’une solution : me rabattre sur ce bon vieux service client qui s’est acquitté de la tâche avec brio… aux heures d’ouverture, c’est-à-dire à des moments où je suis rarement disponible (oui, je sais, si je travaillais moins je n’aurais pas ce problème). Au final, la mise à jour d’une adresse email de contact, acte d’une banalité déconcertante, s’avère d’une complexité insondable pour le malheureux père de famille que je suis. Et tout en relatant cette histoire, je m’interroge : à quoi finalement peut bien servir cette adresse email de contact…? Il est bien temps de s’interroger, me direz-vous !

Un peu plus tard, ma fille a reçu sur son mobile un SMS tout à fait inapproprié pour son âge. Aussitôt, me voilà pourfendant l’Internet à la recherche d’un espace propre à recevoir le signalement de l’émetteur et du contenu du message. L’objectif de cette démarche étant d’une part d’éviter que ma fille en reçoive d’autres (elle est mineure, et SFR le sait puisqu’ils connaissent sa date de naissance…) et aussi de protéger les autres enfants contre cet émetteur (manifestement un numéro surtaxé). Curieusement, me souvenant de la mésaventure décrite plus haut, je renonçais cette fois-ci à accéder à l’espace client de ma fille, pour me rendre sur mon propre espace client (celui offert avec mon abonnement ADSL). Naïf que je suis ! Je pensais pouvoir envoyer un email au service client. Pour cela, alors que j’étais identifié sur mon espace client, je me suis orienté jusqu’aux pages proposant les formulaires de contact. Mais voilà, en indiquant que l’email que je m’apprêtais à envoyer portait sur un Forfait bloqué, l’espace client me repousse vertement, en me demandant… de m’identifier sur l’espace client du forfait en question !

SFR Envoi d'email au service client
Un abonné SFR ADSL ne peut pas envoyer un email portant sur un Forfait bloqué

J’imagine ne pas être le seul dans ce cas-là. Disposer de plusieurs comptes télécoms au sein d’une famille devient courant. Disposer d’un espace client qui soit orienté sur la personne et non sur la ligne télécom, serait très appréciable. En tout cas cela simplifierait la vie des parents !

Médias sociaux et transparence : exemple de Groupon

Groupon, site d’achat groupé créé en 2008, s’appuie largement sur les médias sociaux pour propager les bonnes affaires à ses clients et prospects. Cependant, bien que la croissance de l’entreprise soit fulgurante, Groupon subit déjà quelques attaques de ses partenaires affiliés. Ces attaques sont bien sûr relayées sur les médias sociaux et sont donc susceptibles d’être portées à la connaissance des clients et prospects. Comme toute entreprise tirant partie des médias sociaux, se pose alors la question de la transparence face aux attaques : jusqu’à quel point doit-on les rendre visibles aux clients et prospects ?

La page d’explication du mode de fonctionnement de Groupon indique un premier élément de réponse. En effet, cette page enrichi l’explication du fonctionnement d’un encart YouTube. Cet encart met en avant les vidéos publiées sur YouTube, vidéos a priori favorables à Groupon. Cependant, après avoir visionné la première vidéo, YouTube propose automatiquement des liens vers d’autres vidéos, dont certaines sont beaucoup moins avantageuses.

Groupon
Page d’explication du mode de fonctionnement de Groupon

C’est ainsi que le site Groupon, donne accès à ses clients et prospects, à un reportage diffusé par Grand Lille TV. Ce reportage intitulé « Un spa lillois victime de Groupon » met clairement en cause le modèle d’affaire de l’entreprise. La bonne nouvelle pour Groupon étant que le reportage en question semble d’un impact limité (2827 visionnages selon YouTube au moment de la rédaction du présent article).

On peut se demander si Groupon a délibérément choisi de permettre à ses clients et prospects d’accéder à des contenus publiés sur les médias sociaux, qu’ils soient ou non favorables à l’entreprise. Cela pourrait relever d’un idéal de transparence souvent mis en avant, et serait tout à l’honneur de Groupon, reconnaissant qu’après tout, ce qui existe sur les médias sociaux est accessible qu’on le veuille ou non. Cela pourrait aussi relever d’une faiblesse éditoriale, Groupon pouvant aussi choisir de ne diffuser sur son site que les contenus à son avantage. Et dans ce cas, la question est de savoir si YouTube permet de filtrer les vidéos présentées dans son player.

Pour toute entreprise souhaitant tirer parti des médias sociaux, la question de la transparence doit être abordée. Accepter qu’il existe des contenus peu favorables à la marque est un pré-requis. Étudier ensuite le parcours clients qui peut mener à ces contenus, surveiller leur audience et se préparer à diffuser des contrefeux, sont une nécessité. Ce qui vaut pour une startup comme Groupon, vaut aussi pour une enseigne plus installée. Avec la difficulté supplémentaire que l’enseigne installée hérite d’une image de marque animée par de nombreuses parties prenantes à coordonner.

Addressing customer Paradoxes in the Digital World : le livre est sorti !

"Addressing customer paradoxes in the Digital World", Pearson
"Addressing customer paradoxes in the Digital World", Pearson

J’ai eu l’opportunité d’être le rédacteur en chef de ce nouveau livre « Addressing customer Paradoxes in the Digital World » qui donne un éclairage sur les paradoxes de la relation client dans un monde numérique. Distribué dans toute bonne librairie à compter du 17 juin 2011, il est dors et déjà disponible en précommande sur Amazon dans sa version anglaise. Pour la version française il faudra patienter encore un peu. Mais pourquoi ne pas profiter de l’occasion pour parfaire votre anglais ?

L’éditeur (Pearson) propose un bon résumé de l’ouvrage :

Les développements récents du monde digital préfigurent des bouleversements dans le domaine de la relation client. Ils n’ont rien de virtuel. Les attentes des consommateurs se sont élevées entre souhaits d’accessibilité permanente et comparaison simplifiée, faisant du digital la porte d’entrée numéro un de la relation client. Sont impactés : les modèles de vente (transactionnel), la manière d’interagir avec les clients (relationnel) et la découverte des valeurs de l’entreprise (expérientiel).

Les perspectives sont vertigineuses. La conversion de la relation client au numérique n’en est qu’à ses débuts… Ce livre vous fera découvrir ce qu’elle devrait être demain. Il se compose d’une série d’articles dont voici quelques exemples : Contrôlez votre e-reputation, revêtez vos plus beaux avatars, décrypter comment vos clients deviennent des adeptes ou des détracteurs. Il s’agit d’une version anglaise qui sera suivie d’une version française à l’automne 2011. L’ouvrage vise donc un double public.

Coordonner la rédaction de cet ouvrage a été une aventure professionnelle riche d’enseignements : plus de 40 contributeurs au sein du cabinet ont été associés à cette aventure, répartis dans 4 pays européens. Deux mois ont été nécessaires pour rédiger les premières versions des articles suivis d’un mois de relecture et de maquettage. Un rythme particulièrement intense pour tous ! Issus des missions de conseil menées par le cabinet pour le compte de nos grands clients, ou des réflexions des consultants en relation client, les articles se veulent pragmatiques et opérationnels, tout en prenant le recul nécessaire face aux transformations liées à l’omniprésence du numérique dans nos vies.

Pour ma part, j’ai rédigé l’article intitulé « Nurture and grow digital skills and competences » qui traite de l’impact du numérique sur la gestion des ressources humaines de l’entreprise. J’espère avoir l’occasion ici ou en d’autres lieux de débattre avec les lecteurs de l’ouvrage. Bonne lecture !

e-G8 Forum : deux jours pour nourrir les discussions des chefs d’Etat sur Internet

J’ai eu la chance d’assister aux conférences du e-G8 Forum, les 24 et 25 mai 2011. Ce forum, organisé en amont de la réunion du G8 à Deauville, visait à nourrir les débats des chefs d’Etat du G8 au sujet de l’Internet. Première initiative du genre, le e-G8 Forum témoigne de l’importance que revêt aujourd’hui Internet dans nos économies et nos sociétés.

e-G8 Forum, 24 mai 2011, Nicolas Sarkozy

Le président de la République Nicolas Sarkozy, a proposé une vision enthousiasmante du devenir de l’Internet, et surtout de sa prise en compte au plus haut niveau des instances représentatives de l’intérêt général dans le monde. En tant que président du G8 (la France préside actuellement cette instance), Nicolas Sarkozy offre aux acteurs de l’Internet une écoute de la part des chefs d’Etat des plus grands pays industrialisés. J’ai noté en particulier la posture modeste du chef de l’Etat, reconnaissant avoir à apprendre des acteurs de l’Internet pour préparer l’avenir et favoriser la croissance et l’innovation permise par Internet, et de recommander « ne doutez pas de la révolution en marche ».

e-G8 Forum, 24 mai 2011, Ben Verwaayen et Christine Lagarde

Les tables rondes qui se sont succédées en séances plénières ont été l’occasion de voir débattre les représentants de grands acteurs de l’Internet. Principalement de grandes sociétés telles que Facebook, Google, Orange, Iliad, Vente Privée, Universal Music, mais aussi quelques représentants du monde politique (Christine Lagarde, Frédéric Mittérand et Eric Besson par exemple). On peut déplorer l’absence de représentants issus du tissus économique qui ne sont pas des pure players de l’Internet, ou encore issus du monde de l’éducation, de la culture ou de la société civile (des gens comme vous et moi, simples utilisateurs de services en ligne).

Parmi les intervenants, j’ai noté pêle-mêle quelques points de vue qui ont attiré mon attention. Le détail des interventions étant disponible sur le site Web du e-G8 Forum, il ne me paraît pas pertinent ici d’en dresser un compte-rendu détaillé (de toute façon je n’en aurais pas le temps !), mais plutôt d’insister sur les faits marquants. Ainsi, Sheryl Sandberg (DG Google) considère les médias sociaux comme un moyen de rapprocher les gens et de leur permettre d’accroître leur influence. Andrew Mason (fondateur de Groupon) fait remarquer que 95% du commerce a lieu off line et c’est précisément où Groupon se trouve. Stéphane Richard (PDG Orange) remarque que sans réseau, pas de success story Web. Et il ajoute que la croissance du trafic data est de 5% par semaine à Paris, ce qui incite à réfléchir au risque d’effondrement du réseau et donc au partage des investissements sur les infrastructures réseau (actuellement portés par les opérateurs) ainsi qu’à la distribution des revenus de l’Internet.

 e-G8 Forum, 25 mai 2011, Maurice Lévy et Marc Zuckerberg

Au sujet de la neutralité du Net qui a fait couler beaucoup d’encre (et d’octets !) ces derniers mois, Stéphane Richard recommandait de ne pas limiter le débat aux seuls réseaux et de l’étendre aux éditeurs de services. Sans le nommer, il donnait ainsi l’exemple d’ Apple qui sélectionne les applications éligibles à l’App Store. Au sujet de l’éduction, le professeur Klaus Schwab soulignait que dans l’avenir, l’éducation continue deviendra déterminante, et contribuera au développement de l’utilisation de la vidéo en ligne. J’en arrive même à penser que nous avons besoin d’une éducation disruptive, technologique, sociale, et impliquant la responsabilité des parents et enseignants.

Au bilan de ces deux jours de conférences (je n’ai pas pu assister aux débats du 25 mai matin), je note plusieurs points positifs :

  • Une réelle prise de conscience des pouvoirs publics : évoquer le développement de l’Internet au G8, c’est bien sûr prendre le risque d’une récupération politique, mais c’est aussi saisir l’opportunité d’une accélération au profit de l’humanité
  • Les débats sur la propriété intellectuelle, et sur l’innovation ont été particulièrement animés. Le premier de par les tensions entre les auteurs d’œuvres, les distributeurs et les consommateurs. Le second de par la qualité des intervenants qui en fait une conférence très vivante et intéractive
  • Les conversations de Maurice Lévy avec Nicolas Sarkozy d’une part et avec Marc Zuckerberg d’autre part, étaient particulièrement intéressantes. Je recommande d’ailleurs de les revoir en ligne dans leur intégralité, et de s’accrocher pour suivre le créateur de Facebook qui parle décidément très vite (!)

Je note également quelques points négatifs qui pourront être pris en compte pour l’organisation des futurs e-G8, si tant est que l’initiative se pérennise en amont des prochaines réunions du G8 :

  • La méthode d’animation ne me semble pas forcément efficace pour refléter les points de vue différents et, pour avoir assisté en grande partie à la session de clôture, je doute de la qualité, de l’exhaustivité et de la représentativité des sujets de discussion qui seront remis aux chefs d’Etat. Une interaction plus forte avec la salle, au moyen de la panoplie d’outils 2.0 bien connus des acteurs présents sur la scène, aurait été appréciable. On peut d’ailleurs s’étonner de l’absence d’un Twitter back pendant les débats
  • En complément de ce qui est évoqué plus haut, il n’y avait pas suffisamment de représentants d’acteurs hors du cœur de métier de l’Internet (réseaux, éditeurs logiciel, pure players). Comme le montre l’étude de McKinsey sur la valeur économique générée par Internet, 75% provient désormais d’acteurs qui ne sont pas nés de l’Internet mais sont issus de l’ancienne économie. Or, ils ont aussi une part importante à prendre dans le développement de l’Internet et de ses usages.

Les jours à venir, il sera intéressant de voir comment les chefs d’Etat accueilleront les sujets discussions qui ont émergés de ces deux jours, et comment la multitude d’acteurs de l’Internet poursuivront le débat. A suivre !

A qui appartiennent vos comptes de médias sociaux ?

Vous utilisez des comptes sur différents médias sociaux, et parfois (voire souvent) pour des raisons professionnelles. A priori, ces comptes que vous avez créés par vous-même, vous appartiennent. Pourtant ce n’est pas si évident que ça. Explications.

Les employés des cabinets de recrutement ont, de par leur fonction, intérêt à développer leur réseau social. A ce titre ils sont des utilisateurs avancés des médias sociaux, et il peut être intéressant de comprendre les contraintes auxquelles ils sont déjà confrontés dans leur usage des médias sociaux. En effet, ces contraintes s’imposeront probablement à tous tôt ou tard.

Les deux articles suivants posent le débat, en tout cas pour les utilisateurs américains des médias sociaux :

Les auteurs recommandent ainsi aux utilisateurs de médias sociaux de :

  1. Paramétrer leurs comptes de médias sociaux avec une adresse email alternative à leur adresse email professionnelle
  2. Payer les abonnements aux médias sociaux avec ses propres deniers, ou a minima de différencier l’activité sur les comptes payés par l’employeur
  3. Etudier attentivement les clauses du contrat de travail évoquant l’identité numérique
  4. Archiver les connections crées au fil du temps
  • Facebook : Compte – Paramètres du compte, onglet Paramètres, Télécharger vos données, permet notamment l’extraction de la liste d’amis, mais pas de leurs adresses email
  • LinkedIn : Contacts, puis en bas à droite Exporter vos relations
  • Viadeo : Mes contacts, puis menu de gauche, Exporter mes contacts

Qu’en est-il pour les utilisateurs dépendant du droit français ? Une recherche (certes rapide) de la littérature francophone disponible en ligne sur le sujet, n’aboutit à aucun résultat probant. Alors si vous avez connaissance d’un ou plusieurs articles utiles, n’hésitez pas à les indiquer en commentaires. Et dans l’attente de plus d’information, il est certainement pertinent de suivre les recommandations proposées.

Médias sociaux : pour les petits commerçants aussi

Jeudi 9 avril 2011. Rendez-vous dans un restaurant de La Défense. En arrivant sur place, je sélectionne machinalement Foursquare sur mon Blackberry pour faire un check-in et signaler ma présence en cet endroit à mon réseau social. La liste des choses à faire et conseils attire alors mon attention. Les commentaires laissés par les précédents convives sont loin d’être élogieux, même excessifs à mon goût selon mon expérience de ce restaurant. Mais cette fois-ci, l’expérience a confirmé les commentaires laissés.

La serveuse a été des plus désagréable, nous bousculant plusieurs fois, levant les yeux au ciel à chaque fois qu’on lui demandait quelque chose, y compris la note. Le problème pour elle et pour le restaurant, c’est que nous sommes en 2011 : ce genre  de comportement non professionnel laisse des traces. Bien sûr pour ceux qui l’ont subi (pas sûr que je revienne de si tôt dans ce restaurant !), mais aussi pour leurs proches et pour tous ceux qui passeront par là.

Page du restaurant K10 sur Foursquare
Quelques commentaires peu élogieux laissés par les internautes

En effet, mécontents de l’expérience que nous venions de vivre, nous avons exprimé notre mécontentement sur Foursquare, Twitter et Facebook. Au moins, les prochains convives seront prévenus ! Cependant que nous passions à la caisse, nous en avons parlé au patron du restaurant. Réaction immédiate : « Faut pas faire ça ! Ca va très vite là-dessus ! Je vous fais x% de remise ». Et le patron de joindre le geste à la parole. Aussitôt, nous avons signalé cette bonne action sur les réseaux sociaux. Mais le mal était fait, et déjà le compte @4sqrParis relayait le premier message.

Ce restaurateur vit manifestement avec son époque. Il sait que les médias sociaux sont désormais installés dans le quotidien des consommateurs et qu’une mauvaise réputation peut vite s’y développer. Les grandes entreprises sont attentives à leur réputation, et bien sûr à leur réputation en ligne. Des départements de veille scrutent l’activité des médias sociaux, détectent les mouvements qui peuvent porter préjudice à l’entreprise, et agissent lorsque c’est nécessaire. Les grandes lignes de ce schéma peuvent être aussi reproduits par les petits commerçants.

Ils peuvent même utiliser les médias sociaux à leur profit, comme par exemple la boulangerie « La mie bretonne » qui annonce ses fournées spéciales sur Twitter (@lamiebretonne) et crée ainsi un trafic dans sa boulangerie, et entre en dialogue avec ses clients au-delà du simple « Bonjour, vous désirez ? Une tradition pas trop cuite. 1,05€. Merci, au revoir ». Les temps morts d’activité au sein du commerce peuvent être mis à profit pour créer une animation en ligne et ainsi prolonger l’expérience des clients.

Alors si vous êtes patron d’un petit commerce, jetez un œil sur ce qu’on dit de votre commerce sur les médias sociaux. Et n’hésitez pas à vous inspirer des petits commerçants qui innovent en tirant profit de ces outils pour promouvoir leur commerce.

Stratégie Clients 2011 : B2B et médias sociaux

J’intervenais mardi 5 avril 2011 lors du salon Stratégie Clients sur le thème « Quand le BtoB met l’accélérateur sur la relation client ». Cette table ronde, animée par Yann Gourvennec (@ygourven) réunissait également Hervé Dhelin (@Herve_Marketing) et Eric Munz.

J’ai pu y développer trois grandes convictions :

  • Les médias sociaux sont applicables au B2B (et même surtout)
  • Le ROI des projets de médias sociaux existe (mais ça ne doit pas être un pré-requis)
  • La conduite du changement commence par les patrons

Les médias sociaux sont applicables au B2B (et même surtout)

Dans les années 1990, les développeurs de logiciels étaient déjà coutumiers des plateformes d’échanges entre paires disponibles sur Internet. C’était l’âge d’or des newsgroups et des forums. Ils permettaient à un éditeur (par exemple Microsoft avec MSDN, IBM avec developerWorks ou Sun avec sa communauté Java) d’entretenir une relation avec ses « fans », à savoir, les informaticiens qui utilisaient ses technologies.

Le concept est bien sûr généralisable à d’autres secteurs d’activité, et s’est d’ailleurs largement répandu, jusqu’à permettre aux plus avancés d’innover avec leurs clients qu’il serait plus approprié de dénommer leurs partenaires. C’est ainsi que SalesForce innove avec ses clients via sa plateforme d’innovation collaborative, ou encore que National Instrument a lancé son produit LabVIEW en y implémentant 14 idées soumises par ses clients via sa plateforme sociale.

Pour une entreprise de B2B, s’impliquer dans les médias sociaux, c’est se donner l’opportunité d’entrer en dialogue avec les collaborateurs de ses clients. Ainsi, le commercial n’est plus seulement le porte-parole aseptisé d’une marque, mais l’individu avec lequel l’acheteur est en relation. De même, le concepteur d’un produit ou d’un service, entre ainsi en dialogue avec ses clients utilisateurs ou commanditaires de son offre. Le dialogue ainsi institué est un moyen de mieux comprendre les clients, et bien sûr de les fidéliser. A condition toutefois d’élaborer une véritable stratégie de médias sociaux, et d’en mesurer les résultats.

Le ROI des projets de médias sociaux existe (mais ça ne doit pas être un pré-requis)

Le ROI des médias sociaux fait couler beaucoup d’encre. Et il en fera encore couler. Non qu’il faille l’ignorer voire éluder la question. En revanche, il est aujourd’hui vain de tenter de démontrer a priori le ROI des projets de médias sociaux, bien qu’il soit réaliste de construire un modèle de ROI (en restant toutefois raisonnable sur la précision dudit modèle et sur la précision des hypothèses de calcul retenues). Ce qui n’exclue bien sûr pas de mettre en place un dispositif permettant de le mesurer a posteriori. Dispositif de mesure indispensable à un pilotage avisé des initiatives sur les médias sociaux.

La détermination a priori du ROI ne doit donc pas être un frein au lancement d’une initiative. Comme le propose Erik Qualman (@equalman), l’auteur de Socialnomics, il peut être aussi utile de se demander : quel est le ROI de votre téléphone ? Et pour ceux qui auraient besoin de quelques chiffres pour se rassurer, il est toujours intéressant de voir et revoir ses excellentes présentations vidéo :


La conduite du changement commence par les patrons

Sans l’accord des dirigeants d’une entreprise, toute initiative ne peut se développer durablement. C’est une évidence, et c’est pour cela qu’il est nécessaire de commencer la conduite du changement induite par les projets de médias sociaux en commençant par convaincre les dirigeants de l’entreprise.

J’ai eu l’occasion de développer ce sujet dans le livre « Les médias sociaux expliqués à mon boss ». L’argumentation tient en quatre principaux points :

  • La méconnaissance des médias sociaux
  • L’habitude du rationnel (encore le ROI !)
  • L’image des médias sociaux véhiculée par les médias traditionnels
  • Le risque d’impact sur l’organisation de part la transversalité des médias sociaux

Je vous invite bien sûr à vous procurer un exemplaire du livre pour connaître le détail de cette argumentation et toutes les bonnes choses que les auteurs (Yann Gourvennec – @ygourven (encore lui !), et Hervé Kabla – @hervekabla) ont réunies.

En guise de conclusion, j’ai pu développer ma vision du futur des médias sociaux en trois points :

  • Transversalité : toutes les directions de l’entreprise sont touchées et les médias sociaux sont un bon support pour recréer du lien entre les individus, au-delà de leur rattachement organisationnel.
  • Simplicité : les outils actuels pour agir sur les médias sociaux restent encore dans un monde à part et devront mieux s’intégrer dans le poste de travail pour que leur usage devienne naturel au plus grand nombre.
  • Humanité : les médias sociaux sont un excellent moyen de remettre de l’humain dans le digital, en recréant la proximité entre les individus.

Temps de travail et médias sociaux font-ils bon ménage ?

Relayant une étude de la société Sciforma, Cadremploi posait la question : « Pas plus de 12 minutes de concentration au bureau : est-ce grave ? ». L’annonce est péremptoire et sans appel : nous serions donc désormais dans une époque où il n’est plus possible de travailler sans être interrompu toutes les 12 minutes en moyenne. Et on se prête à regretter le temps bénis qui précéda l’invention du téléphone, cet affreux moyen de communication qui perturbe la quiétude de nos journées.

Et comme les réseaux sociaux sont à la mode, ils sont évidemment montrés du doigt comme étant un des agents générateurs de perturbation. Car c’est bien connu, les salariés des entreprises sont excessivement attentifs à l’arrivée d’un message provenant de leur réseau social favori. A croire que les tâches qui leur sont confiées sont d’un tel ennui, que l’émergence des réseaux sociaux dans leur poste de travail a pu leur sembler libératoire.

Le communiqué de presse de Sciforma donne plus de précisions : en recevant en moyenne 40 messages par jour, sur une durée moyenne de temps de travail journalier de 8 heures, chacun reçoit un message toutes les 12 minutes. Conclusion, je cite, « Il est impossible de travailler plus de 12 minutes sans être interrompu ». CQFD. Et encore, l’étude ne prend pas en compte les interruptions dues aux conversations des collègues de bureau. Dommage.

Toutes ces interruptions sont-elles réellement subies par les français ? Seraient-ils à ce point incapables de désactiver les notifications automatiques d’arrivées d’emails, les notifications de publications sur les réseaux sociaux auxquels ils sont abonnés, la sonnerie de leur téléphone, etc, jusqu’à désormais être dans l’impossibilité de travailler plus de 12 minutes sans être interrompus ?! Si c’est effectivement le cas, il est urgent que les entreprises aident leurs collaborateurs à mieux utiliser les outils qui leurs sont mis à disposition, mais aussi les outils et services qu’ils apportent avec eux au sein de l’entreprise.

Il est également nécessaire d’étudier objectivement l’apport de ces outils à la création de valeur. Et si pour créer plus de valeur, travailler plus efficacement, il s’avérait préférable de favoriser la fluidité des interactions en développant massivement l’usage des médias sociaux, et en acceptant la part d’utilisation personnelle qui peut en être faite ? De la même manière que dans le passé, les machines à café se sont progressivement imposées dans les locaux des entreprises, contribuant ainsi au lien social qui unit les collaborateurs au-delà des liens fonctionnels entre les postes qu’ils occupent, les médias sociaux sont un formidable accélérateur de collaboration. Pour s’en convaincre, il peut être utile de prendre connaissance des nombreux exemples qui sont détaillés dans « Les médias sociaux expliqués à mon boss ».

Se priver du potentiel des médias sociaux, sous prétexte que les collaborateurs risquent d’être distraits dans leur travail, revient à éluder un sujet bien plus important : l’intérêt des tâches confiées, et la motivation des collaborateurs à les réaliser avec la meilleure efficacité possible. C’est en réfléchissant à ces aspects qu’il sera possible de mettre en perspective le temps de travail avec la manière d’interagir avec son entourage professionnel et personnel, au profit du collaborateur et de l’entreprise, et non en comptant les messages qu’ils reçoivent sans mettre en relief la pertinence de ces messages.

Réputation, gestion de crise et médias sociaux, le cocktail détonnant

Le « bad buzz » dont Air France a fait les frais la semaine dernière et qui a agité la twittosphère (voir à ce sujet la réponse apportée par la Community Manager d’Air France), montre à quel point la réputation d’une entreprise, aussi sérieuse soit-elle dans sa capacité à gérer des crises majeures, peut se retrouver sous le feu des critiques de manière extrêmement rapide sous l’impulsion des médias sociaux. Pour la plupart des entreprises, ce cas peut servir d’exemple, et elles peuvent en tenir compte dans le processus de gestion de crise, au service de leur réputation.

La réputation d’une entreprise, est d’abord et avant tout le résultat du travail de ses salariés : de bons produits ou services, une réponse adaptée aux besoins de ses clients, une capacité à gérer les inévitables clients mécontents, un engagement sociétal, le respect des normes, etc., sont autant de facteurs influents la réputation d’une entreprise. Cette réputation, entretenue au quotidien, peut être mise à mal lors d’une crise, quelle que soit la nature de la crise. Le responsable des risques prend ainsi en compte dans son analyse, entre autres l’ensemble des risques qui peuvent impacter la réputation de l’entreprise, ou plus exactement la confiance que les externes accordent à l’entreprise.

Les risques susceptibles d’avoir un impact sur la réputation de l’entreprise peuvent être utilisés pour définir le cadre des activités de veille. Au quotidien, l’équipe de veille cible ainsi son activité sur l’analyse des sources de contenus lui permettant de diffuser aux opérationnels, les informations collectées à l’extérieur de l’entreprise, et pouvant donner lieu à une action de leur part. En parallèle, et lorsque la situation l’exige, le responsable des risques peut inciter l’équipe de veille à prendre en compte dans son activité, un ensemble de thèmes d’actualité qu’il est nécessaire de surveiller plus attentivement. Avec l’émergence des médias sociaux et l’accélération de la propagation de l’information qu’ils permettent, cette collaboration étroite entre le responsable des risques, l’équipe de veille, et les opérationnels des différentes directions de l’entreprise, devient de plus en plus nécessaire. Une gouvernance doit également être mise en place pour piloter les processus de gestion des risques (à cycle annuel) avec les processus de veille (à cycle quotidien) et les processus opérationnels. Le schéma ci-dessous illustre ainsi cette coordination de processus éminemment transverses au sein de l’entreprise :

Gestion de risque, organisation de veille et médias sociaux
Gestion de risque, organisation de veille et médias sociaux

Au sein de votre entreprise, les équipes en charge des risques, de la veille et les opérationnels sont-elles en relations régulièrement ? Les médias sociaux sont-ils pris en compte dans les processus de gestion crise ? La rapidité de réaction qu’exigent les médias sociaux est-elle bien intégrée dans les processus opérationnels de dialogue avec les externes à l’entreprise ? L’ensemble des collaborateurs concernés par la gestion d’une crise (et ils sont de plus en plus nombreux sous l’impulsion des médias sociaux), sont-ils coordonnés dans leurs actions ? Autant de questions qu’il peut être utile de se poser pour améliorer la capacité de l’entreprise à gérer les crises à l’ère des médias sociaux.

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